L’industrie de l’armement représente un secteur économique important pour la Wallonie, employant directement plus de 3600 personnes. Cependant, les exportations d’armes soulèvent de sérieuses questions quant au respect du droit international et des règles européennes, en particulier lorsqu’elles sont destinées à des pays accusés de violations des droits humains. Le septième rapport de l’Observatoire des armes wallonnes, publié en juin 2024, dresse un état des lieux détaillé de cette problématique complexe.
Un business florissant malgré la crise
En 2023, les exportations réelles d’armes de la Région wallonne ont atteint 365 millions d’euros, en augmentation de 3% par rapport à 2022. Ces chiffres témoignent de la vitalité économique du secteur, mais soulèvent également des interrogations sur la conformité de ces exportations avec les obligations légales de la Wallonie.
La Belgique, et par extension la Wallonie, est signataire du Traité sur le commerce des armes, ratifié en 2014. Ce traité vise à établir « les normes communes les plus strictes possibles » en matière de commerce d’armes pour préserver la paix et la sécurité. De plus, la Wallonie est tenue de respecter la Position commune de l’Union européenne sur le contrôle des exportations d’armes, ainsi que son propre décret du 21 juin 2012 réglementant l’importation, l’exportation, le transfert et le transit des armes.
Des clients sulfureux au mépris du droit
Malgré ces cadres juridiques contraignants, plusieurs destinations d’exportation posent problème. L’Arabie saoudite, longtemps première destination des exportations wallonnes, a bénéficié entre 2014 et 2019 de licences pour un montant de 1,7 milliard d’euros, et ce malgré son implication dans le conflit au Yémen où elle est accusée de crimes de guerre. Cette situation a été jugée contraire au Traité sur le commerce des armes et à la Position commune de l’UE par diverses instances, dont le Parlement européen et la Cour d’appel de Bruxelles.
« ArmesWallonnes: conseil de lecture à @PYJeholet qui affirme qu’il ne faut pas « être plus catholique que le pape ». Il pourrait s’informer sur des ventes wallonnes irresponsables vers le Nigéria, la Serbie, l’Indonésie, etc. ici.» François Graas, Amnesty International Belgique.
D’autres cas soulèvent des questions similaires. L’Égypte, où les violations des droits humains sont systématiques, a bénéficié de licences pour près de 24 millions d’euros entre 2017 et 2022. L’Indonésie, impliquée dans la répression en Papouasie occidentale, a obtenu des licences pour 237 millions d’euros sur la même période. Ces exportations semblent difficilement conciliables avec les critères établis par la législation européenne et internationale.
Israël, un cas explosif
Le cas d’Israël est particulièrement problématique au regard du droit international. Entre 2017 et 2022, la Wallonie a octroyé 21 licences d’exportation vers ce pays pour un total de 32,5 millions d’euros. Des révélations récentes sur le transit par l’aéroport de Liège d’armes destinées à Israël ont conduit plusieurs ONG à annoncer une action en justice contre la Région wallonne, estimant que ces transferts violent le droit international humanitaire.
La loi bafouée ?
La question du contrôle des utilisateurs finaux et de la lutte contre le détournement d’armes est cruciale dans le respect des obligations légales. L’affaire New Lachaussée, impliquant des contrats avec des entreprises serbes, a soulevé des inquiétudes quant à un possible contournement des sanctions contre la Russie, ce qui constituerait une violation grave du droit européen.
Face à ces problématiques, plusieurs actions juridiques ont été engagées. Outre l’action annoncée contre la Région wallonne concernant le transit d’armes vers Israël, une plainte au pénal a été déposée contre la FN Herstal, accusée d’avoir continué à exporter des armes vers l’Arabie saoudite sur la base de licences invalidées par le Conseil d’État. Ces procédures visent à faire respecter le cadre légal existant.
La justice s’en mêle
Au niveau international, des ONG demandent à la Cour pénale internationale d’enquêter sur le rôle des dirigeants des sociétés d’armement européennes et des responsables des licences d’armement dans les crimes de guerre présumés au Yémen. Cette démarche s’inscrit dans une volonté d’appliquer le droit pénal international aux acteurs du commerce des armes.
Le débat sur les exportations d’armes wallonnes ne se limite donc pas à des considérations éthiques, mais pose la question fondamentale du respect de l’État de droit. Il met en lumière les tensions entre intérêts économiques et obligations légales internationales et européennes. La Wallonie, comme toute entité exportatrice d’armes, doit non seulement se conformer à sa propre législation, mais aussi aux traités internationaux qu’elle a ratifiés et aux règles européennes qui s’imposent à elle.
Opacité et contrôle défaillant
La transparence reste un enjeu majeur dans ce contexte. Bien que la Région wallonne publie des rapports annuels sur ses exportations d’armes, ces documents sont souvent critiqués pour leur manque de détails et leur publication tardive. Cette opacité relative complique le contrôle démocratique et juridique des exportations d’armes, pourtant essentiel au respect des obligations légales.
Un débat crucial pour l’avenir
En conclusion, le dossier des exportations d’armes wallonnes illustre les défis auxquels sont confrontés les États dans la conciliation de leurs intérêts économiques avec leurs obligations légales internationales. Il souligne la nécessité d’un contrôle rigoureux et transparent des exportations d’armes, non seulement pour des raisons éthiques, mais surtout pour garantir le respect du droit international et des règles européennes. Cette question cruciale nécessite un débat de fond, impliquant l’ensemble des acteurs concernés, pour assurer que la Wallonie honore pleinement ses engagements juridiques tout en préservant ses intérêts économiques légitimes.
Article rédigé en partie avec IA.