L’argument selon lequel « peu importe à qui on vend des armes, car si ce n’est pas nous, d’autres le feront », qui ressort à l’occasion de la déclaration de politique régionale wallonne, est non seulement moralement bancal, mais aussi juridiquement problématique.
Précisons d’emblée qu’il ne s’agit pas ici de fermer nos usines d’armement. Les démocraties ont le devoir de protéger leurs citoyen·nes. Nous parlons ici de commerce avec des régimes qui commettent des violations massives des droits humains.
Responsabilité morale et éthique
Le fait que d’autres puissent agir de manière irresponsable ne justifie en aucun cas que nous le fassions aussi. En tant que nation, nous avons la responsabilité morale de ne pas contribuer, même indirectement, à des violations des droits humains ou au renforcement de régimes oppressifs. Notre politique d’exportation d’armes doit refléter nos valeurs et principes éthiques, pas seulement des considérations économiques.
Cadre juridique international
Le droit international est clair sur ce point. Le Traité sur le commerce des armes (TCA), adopté par l’Assemblée générale des Nations Unies en 2013, interdit explicitement les transferts d’armes qui pourraient être utilisées pour commettre ou faciliter des violations graves du droit international humanitaire ou des droits de l’homme.
De plus, la Position commune de l’Union européenne 2008/944/PESC définit des règles communes régissant le contrôle des exportations de technologie et d’équipements militaires. Elle oblige les États membres à évaluer les demandes d’autorisation d’exportation au cas par cas, en tenant compte de critères tels que le respect des droits de l’homme dans le pays de destination finale et la préservation de la paix, de la sécurité et de la stabilité régionales.
Conséquences concrètes
Il est crucial de se poser la question : combien de vies innocentes sommes-nous prêts à sacrifier pour maintenir des emplois dans l’industrie de l’armement ? Cette question met en lumière le coût humain réel de ces décisions apparemment économiques. Chaque arme vendue à un régime répressif peut potentiellement être utilisée contre des civils innocents. Aucun emploi ne devrait être considéré comme plus précieux que ces vies. En février 2019, une enquête menée par Arab Reporters For Investigative Journalism révélait que des armes wallonnes (FN Minimi) avaient été retrouvées aux mains de milices armées affiliées à Al-Qaïda dans la péninsule arabique.
Alternative positive
Plutôt que de nous cacher derrière le cynisme, nous pouvons choisir d’être une force positive dans le monde. Cela implique :
- De respecter scrupuleusement nos engagements internationaux.
- D’établir des processus de vérification rigoureux pour les exportations d’armes.
- De promouvoir activement la paix et la stabilité par des moyens diplomatiques et économiques.
En conclusion, l’argument du « si ce n’est pas nous, d’autres le feront » n’est pas seulement moralement répréhensible, il va à l’encontre du droit international et de nos responsabilités en tant que nation. Nous avons le pouvoir et le devoir de faire des choix éthiques, même si cela implique des défis économiques à court terme. La vie humaine et la stabilité mondiale doivent toujours primer sur les profits de l’industrie de l’armement.