La Cour européenne des droits de l’homme a créé aujourd’hui un précédent essentiel et historique en statuant, dans l’affaire des femmes suisses, que le gouvernement suisse n’avait pas respecté les obligations qui lui incombent en vertu de la Convention européenne sur le changement climatique, notamment en ne fixant pas de limites claires aux émissions de gaz à effet de serre et en n’atteignant pas les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre qu’il s’était fixés par le passé.
La détermination et la ténacité des requérants dans les trois affaires, qui ont cherché à obtenir une justice climatique par le biais des tribunaux, sont à la fois remarquables et encourageantes.
L’arrêt rendu dans l’affaire suisse renforce les voies juridiques permettant d’obtenir une justice climatique par l’intermédiaire de la Cour européenne des droits de l’homme. Il est extrêmement important que la Cour européenne des droits de l’homme reconnaisse le préjudice causé aux requérants par le changement climatique et que le gouvernement suisse n’en fait pas assez pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et les protéger de manière adéquate.
Les litiges stratégiques peuvent contribuer à rendre la justice climatique et à protéger les droits de milliards de personnes face au réchauffement climatique, en particulier les plus marginalisées, et ils porteront leurs fruits, comme nous l’avons vu aujourd’hui avec l’affaire suisse.
Contexte
La Cour européenne des droits de l’homme s’est prononcée sur trois affaires relatives au climat. Dans l’affaire Klimaseniorinnen Schweiz et autres c. Suisse, un groupe représentant plus de 2 500 femmes suisses âgées a fait valoir que l’incapacité de leur gouvernement à atténuer de manière adéquate le réchauffement climatique violait leurs droits humains à la santé et à la vie et les exposait au risque de mourir pendant les vagues de chaleur.
Dans l’affaire Duarte Agostinho et autres c. Portugal et 31 autres États, six jeunes Portugais ont fait valoir que les pays liés par la Convention européenne des droits de l’homme – les 27 États de l’UE, ainsi que le Royaume-Uni, la Suisse, la Norvège, la Russie et la Turquie – avaient porté atteinte à plusieurs droits humains après que des vagues de chaleur et des incendies de forêt eurent entraîné la fermeture de leurs écoles et mis leur santé en péril. Amnesty International a présenté une tierce intervention conjointe dans cette affaire sur l’obligation pour les gouvernements d’élaborer des politiques climatiques qui protègent les droits des personnes se trouvant hors de leurs frontières.
Dans la troisième affaire, Damien Carême, ancien maire de Grande-Synthe, une banlieue de Dunkerque dans le nord de la France, a fait valoir que le gouvernement français avait manqué à son obligation de protéger la vie en ne prenant pas de mesures suffisantes pour prévenir le changement climatique et en augmentant ainsi le risque d’inondations futures dans la région.
Le droit à un environnement propre, sain et durable a été universellement reconnu par l’Assemblée générale des Nations unies en 2022. Amnesty International fait partie d’une coalition qui demande l’adoption d’un protocole additionnel sur ce droit à la Convention européenne des droits humains, qui permettrait de renforcer et de clarifier la jurisprudence de la CourEDH en matière de protection de l’environnement, y compris en ce qui concerne le changement climatique.